François Aunis : un homme engagé et visionnaire
Les élus de la commune de Fillière tiennent à rendre hommage à François Aunis, qui, dans de nombreux domaines, a été un précurseur et a marqué Thorens-Glières par ses nombreux engagements.
Tout d’abord en tant que directeur de l’école primaire publique où il a su fédérer autour de lui l’équipe enseignante en étant à l’écoute de tous et en instaurant un état d’esprit bienveillant. Particulièrement dynamique, il a multiplié les projets pédagogiques, organisé de nombreux voyages, de nombreuses sorties dont les mémorables journées au téléski de Montpiton. Des centaines de jeunes thoranaises et thoranais ont profité de la qualité de son enseignement et gardent un souvenir ému de leur passage dans sa classe.
Sa curiosité et son sens de l’intérêt général l’ont très vite amené à s’engager dans l’action municipale. Élu de 1965 à 1995, il a occupé les fonctions d’adjoint et surtout de maire entre 1983 et 1995 où il s’est montré particulièrement visionnaire. Alors que les thèmes de la mobilité et de l’environnement n’étaient encore évoqués par personne, il a mis en place un service communal de transport entre Annecy et Thorens-Glières, a fait construire une chaufferie-bois pour chauffer la MJC et l’école. Il est également à l’origine du jumelage avec Esnandes, jumelage qui va fêter en 2024 ses 40 ans. François Aunis a fait partie de ces maires visionnaires qui ne se contentent pas de gérer l’existant mais qui ont la volonté de réformer, d’aller de l’avant pour changer la société, bâtir un monde plus juste et plus durable.
Mais être en avance sur son temps, anticiper les changements sociétaux n’est pas forcément bénéfique électoralement. François Aunis en a fait l’amère expérience en étant battu aux élections municipales de 1995. Une blessure sans doute jamais refermée mais qui ne l’a pas empêché de poursuivre son action en jouant un rôle majeur au sein de l’association des anciens maires et adjoints dont il assuma la présidence pendant des années.
Homme de convictions, il s’est également fortement impliqué dans la vie politique départementale. Infatigable militant socialiste, il a joué un rôle majeur au sein du PS départemental aux côtés de son ami Robert Borel, maire d’Annemasse. Il en fallait du courage en cette fin du vingtième siècle pour afficher ses idées de gauche dans un département totalement contrôlé par la droite. Ce militantisme actif va le conduire au Conseil Régional où il a siégé de 1992 à 1998. Il va également pleinement s’engager dans les campagnes présidentielles de 1981 et 1988 derrière François Mitterand. On le connaît également comme président de l’association des maires ruraux en Haute-Savoie.
Déterminé, engagé et visionnaire, François Aunis laissera une trace durable ici à Thorens-Glières. Contrairement à certains élus qui ne font que passer, il laisse derrière lui une trace et de nombreuses réalisations concrètes. Il est pour les élus de Fillière un exemple et c’est notamment pourquoi nous lui rendons un dernier hommage.
La passion de Henri Laffin : la musique
Henri Laffin nous a également quittés le 21 mai dernier. Si vous avez participé un tant soit peu à la vie culturelle du coin, à la fête de Thorens, un concert ou un hommage militaire, vous l’avez forcément vu.
Né le 12 mars 1936, Henri Laffin a grandi dans la musique. Ce Thoranais passionné, dont le grand-père avait monté la fanfare en 1885, a pris le relais dès 1946. Henri était un musicien accompli et «touche-à-tout», jouant de nombreux instruments au sein de l’Avenir Musical des Glières (bugle, trompette, saxophone, accordéon) et à l’église (orgue, harmonium). Henri aura marqué la vie locale avec sa bonne humeur et son entrain. Toutes nos pensées vont à sa famille, ainsi qu’à «sa famille de la musique», l’Avenir Musical des Glières.
Souvenir de Henri Laffin, témoignage recueilli par Sylvie Saunier – Mémoire & Racines
« Henri, votre passion c’est la musique. Depuis quand jouez-vous ?
Il sourit.
Depuis 1946… ça fait 70 ans.
Et vous n’avez jamais arrêté ?
Non jamais. Mon grand-père Ernest était maire, c’est lui qui a monté la fanfare en 1885, avec un docteur comme chef. Ça marchait bien mais à la guerre de 1914, ils ont dû arrêter. Et puis en 1936, c’est un coiffeur qui l’a remontée avec son père. Il avait fait ses études à Lyon où il allait au conservatoire. Il y a eu à nouveau un trou pendant la seconde guerre, mais en 1945 il a recréé la fanfare. Il cherchait du monde. J’étais gamin, j’y suis allé, j’ai appris la musique et je n’ai jamais arrêté. Même au régiment, j’étais à la fanfare. Et pendant la guerre d’Algérie, avec d’autres soldats, on avait monté une troupe. Quand je suis revenu de la guerre, c’est le même chef de fanfare, le coiffeur, qui est, venu me chercher à la gare de Groisy avec sa 4 CV et un clairon tout neuf ! Et il m’a dit : « Henri, t’es revenu, on remonte la fanfare ». Alors c’est reparti. On n’était pas nombreux à Thorens, alors on a complété, un temps, avec Cruseilles, puis avec Cran-Gevrier. Pendant 44 ans, j’ai joué à Thorens et à Cran. Et pendant 15 ans j’ai joué aussi dans la clique des pompiers, et également avec les majorettes.
Vous jouez de quel instrument ?
Oh, je joue de plusieurs instruments : j’ai commencé à la fanfare avec un bugle. C’est un piston comme la trompette, mais ce n’est pas tout à fait le même son. Et puis après j’ai joué de la trompette, pendant 22 ans. Le chef a découvert par hasard que je jouais du saxophone lors d’une petite fête, et il y en avait un à l’harmonie dont personne ne se servait. Depuis ce temps-là je joue du saxophone-baryton. Il y a 10 ans, je voulais arrêter. J’avais peur d’en avoir marre. Mais à la fanfare, ils m’ont acheté un saxophone tout neuf, alors j’ai bien été obligé de continuer, au moins pour l’user un peu.
Il rit.
Je joue aussi de l’accordéon. Et puis de l’orgue à l’église. C’est le curé de l’époque qui m’a appris l’harmonium, c’était un fort bon musicien aussi. J’ai joué la première fois en 1960. Ça fait plus de 50 ans quoi. Et je joue toujours. On est 6 paroisses regroupées, et 4 organistes, alors on tient un planning pour qu’à chaque office, il y en ait toujours un de disponible.
Et vous alliez loin avec la fanfare ?
Oh oui, on en a fait des fêtes : la vogue de Thorens bien sûr, mais aussi partout en France : la Fête du Mimosa à Mandelieu, la première fois il y a 47 ans. C’était une toute petite fête à l’époque, elle a lieu en février, on se levait le matin là-bas il faisait 18°, et quand on rentrait ici il y avait 80 cm de neige… et à la Fête du parfum à Grasse, je crois que l’on a défilé 7 heures de temps, entre le matin et l’après-midi. Et puis la Fête de la Fraise vers Lyon, et aussi en Alsace, en Bretagne à Pornichet, dans le Midi, dans les Pyrénées. On est allé à Paris, on a joué sous l’Arc de Triomphe. C’était tout par connaissance. Avec Cran on allait loin, on partait généralement trois jours. Le chef de fanfare passait dans les usines où l’on travaillait pour dire qu’on devait aller à tel endroit, et on nous laissait partir. Au départ, on y allait en car, mais après on prenait le train, c’était plus tranquille.
Mais alors, c’était trois jours de fête.
Qu’est-ce qu’on a pu rire ! On ne faisait pas de politique. Un jour, on a joué le matin à la messe à Meythet, l’après-midi on a défilé au Festival des Musiques à St-Julien, et le soir à la Fête du Parti communiste à Annecy. Ah, on en a déjà bien soufflé…
Parlez-moi d’autrefois.
On allait à l’école à Thorens : trois kilomètres pour aller à pied, et d’autres encore de plus loin. On partait avec notre bidon, car il n’y avait pas de cantine. Et on le faisait réchauffer sur le poêle. On jouait au théâtre également. C’était le curé qui nous faisait répéter. On commençait vers 6-7 ans et on continuait jusqu’à 20 ans. Il disait : « Je vous mets sur les planches bonne heure, quand vous serez grand, vous n’aurez pas peur de parler en public ». Il avait raison. Certains venaient d’Aviernoz ou des Ollières, à pied ou à vélo aux répétitions par des mauvais chemins, parce que s’il n’y avait pas des gens comme ce coiffeur ou ce curé pour monter des activités, il n’y avait rien. Le car passait une fois par semaine : on ne pouvait pas aller à Annecy étudier la musique ou le théâtre en sortant de l’école. Autrefois, il y avait toujours du boulot. Par exemple, quand j’avais 16 ans, les gardes des Eaux et Forêts venaient nous chercher pour planter des sapins. On faisait la batteuse aussi. C’était moins mécanisé que maintenant il faut dire, alors il fallait de la main-d’œuvre.
Je lui demande s’il accepte que je le prenne en photo. Il part chercher son saxophone, le pose sur la table :
« Le son correspond à la contrebasse à corde, c’est plus grave qu’un saxo normal. »
Il l’attache, s’échauffe avec quelques notes et attaque un petit morceau. Je reconnais « Les fiancés d’Auvergne ». C’est beau, c’est grave.
Henri a répétition ce soir, et s’il y a longtemps qu’il en a perdu le décompte, il parle de sa passion avec des étoiles dans les yeux.
La musique n’est pas prête de s’arrêter dans le cœur d’Henri. »
Une réflexion sur « Hommages »
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